Ces dernières années, on voit fleurir le terme féminisme intersectionnel dans les discussions sociales, les publications militantes et même les campagnes de marques. Mais que veut-on vraiment dire par là? Et surtout, est-ce simplement une nouvelle étiquette tendance… ou une clé essentielle pour une vraie justice sociale?
Comprendre les croisements d’inégalités
Le mot peut sembler complexe, mais l’idée est simple : le féminisme intersectionnel reconnaît que les oppressions ne se vivent pas en silo. On ne vit pas le sexisme d’un côté, le racisme de l’autre, la pauvreté ailleurs. Pour bien des femmes, ces réalités se superposent, s’entrelacent et se renforcent mutuellement.
Le terme a été popularisé par Kimberlé Crenshaw, juriste afro-américaine, à la fin des années 80. Elle expliquait que les femmes noires, par exemple, étaient souvent invisibles dans les analyses féministes (centrées sur les femmes blanches) et dans les luttes antiracistes (souvent centrées sur les hommes noirs). Résultat : leurs expériences spécifiques étaient ignorées.
C’est de là qu’est née l’idée de l’intersectionnalité : pour voir toute la réalité d’une personne, il faut regarder tous les systèmes d’oppression qui s’entrecroisent dans sa vie.
Concrètement, ça change quoi?
Un féminisme intersectionnel, c’est un féminisme qui écoute et inclut toutes les voix — pas seulement celles qui ont le plus de pouvoir ou de visibilité.
C’est se demander :
Est-ce que les femmes autochtones ont accès à la même sécurité que les autres?
Est-ce que les femmes migrantes ou sans statut peuvent porter plainte pour violence?
Est-ce que les personnes trans se sentent accueillies dans les espaces féministes?
Est-ce que les femmes en situation de handicap peuvent participer aux mobilisations?
Parce que l’égalité réelle ne peut pas exister si elle n’est valable que pour certaines femmes.
L’intersectionnalité n’est pas une mode, c’est un réveil
Oui, le mot est parfois utilisé à la légère. Il peut devenir un "hashtag" pratique pour paraître engagé. Mais si on l’aborde avec sincérité, c’est bien plus que ça. C’est un outil d’analyse, un regard nouveau, un engagement à ne laisser personne derrière.
Ça demande du travail : écouter plus, déconstruire nos réflexes, reconnaître nos privilèges. Mais c’est aussi une immense richesse. Car plus on inclut de perspectives, plus nos luttes deviennent puissantes, solidaires, vivantes.
Et maintenant?
Il ne suffit pas de dire qu’on est pour l’égalité. Il faut se demander : égalité pour qui? Le féminisme intersectionnel nous pousse à sortir de nos angles morts. À se rappeler que, derrière chaque mot, il y a des réalités vécues. Et que nos luttes sont plus fortes quand elles s’embrassent les unes les autres, au lieu de se croiser sans se voir.

コメント